Titre 1
De la terre jusqu'au ciel
Une exposition de Pauline Chappet
Vit et travaille à Nîmes
Lorsque Roland Barthes a écrit le Journal du deuil, il ne l’a pas fait pour extérioriser sa douleur, mais pour se souvenir, pour "combattre l’oubli ".
Pauline Chappet, artiste plasticienne diplômée de l’École Supérieure des Beaux-Arts de Nîmes, expérimente également cette faculté de se rappeler, car la perte entretient des liens avec le souvenir.
La mort est dans les pays occidentaux un drame, lorsqu’on fête nos morts, c’est un moment de deuil intense, un événement solennel alors que sur d’autres continents, il s’agit d’une véritable célébration de la vie. Néanmoins, la mort est pour l’artiste le sujet qu’elle a choisi d’explorer à travers ses œuvres. En effet, la jeune femme s’inspire de son vécu, qui a été jalonné par la perte d’êtres chers pour questionner les notions de deuil, de mémoire. Les pièces qui en découlent comportent donc un important caractère autobiographique et sont empreintes d’une forte charge émotionnelle.
Sans se restreindre à un médium en particulier, elle explore ces thématiques personnelles, mais surtout universelles et se focalise sur des matériaux comme la gravure, la céramique, le feutre, la craie. L’utilisation de ces derniers dans sa production lui donne un aspect ludique. Les créations qui émanent de sa pratique jalonnent l’univers de l’enfance, de son imaginaire et de la fête avec toute la symbolique que cela entraîne, l’allégorie du temps qui passe.
Ses travaux sont généralement de petites tailles et renvoient à des objets du réel rythmant notre quotidien et qui ont déjà une symbolique, une histoire dans le monde populaire. En les reproduisant ou en les détournant, elle leur donne une autre dimension qui s’approche de la sacralisation.
L’univers folklorique est très présent dans son travail. Les fêtes, souvent liées aux superstitions, sont à l’origine de cérémonies spirituelles et religieuses destinées à purifier une communauté ou à commémorer un évènement marquant, ainsi l’idée même de festivité s’affilie avec le souvenir. À travers ces thématiques l’artiste nous rappelle que toutes les choses ont une fin car même si elle cherche à représenter des moments joyeux, il y a toujours une atmosphère mélancolique.
Malgré un éclectisme dans ses choix de médiums, son style est toujours identifiable par la symbolique qu’elle véhicule, on y remarque une ambivalence entre joie et douleur. Ce qui amène le spectateur à s’interroger sur sa propre vie et son quotidien.
Ainsi dessins, éditions et installations lui permettent de capter la poésie du réel, du quotidien, mais ils prennent également la place et la fonction de relique, preuve et trace de son existence tels des objets-souvenirs : des outils qui permettent de se rappeler.
En s'inspirant de tout ce qui l’entoure Pauline Chappet recrée des environnements qui nous sont familiers. Notamment, lorsqu’elle reproduit dans Pigeon vole, l’architecture intérieure et l’agencement des maisons de nos grands-mères : entassement de bibelots, tapisserie Kitsch, accumulation de cadre, toute cette mise en scène nous touche, fait remonter des sensations de "déjà-vu".
Ces installations a priori banales deviennent objets d’art par la symbolique qu’elles véhiculent celle d’un souvenir universel. Le quotidien lui permet d’ancrer ses souvenirs dans le réel, de rester terrestre et éternelle.